Sasha Katz x Guests est une plongée dans l’univers artistique de Sasha Katz, une mise en lumière de ce qui l’inspire et la nourrit, et la rencontre exceptionnelle de son travail avec celui d’artistes qu’elle admire. En filigrane, l’exposition explore notamment les notions de fatalité et de libre arbitre.
Commissariat par 1703 / Elisabeth Karolyi
Soutenu par 17mars
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> Article White Mirror, par Nina Knaack
À travers une galerie de portraits non conventionnels, la créatrice d’origine russe nous emporte dans un monde intérieur et mystérieux, peuplé d’héroïnes envoûtantes aux pensées impénétrables. Qui sont-elles ? D’où viennent-elles ? Et que nous disent- elles ?
De prime abord, la facture particulière des images questionne, évoluant dans un entre-deux, un peu à la manière des personnages qu’elle enveloppe : modelées tridimensionnellement sur ordinateur, ces femmes flirtent avec le photoréalisme tout en se gardant bien de l’atteindre, comme pour nous rappeler que c’est d’un monde imaginaire qu’il s’agit ici. On pourrait croire les peaux en cire, bien que perle sur elles de la transpiration, que l’on devine des poils et quelques grains de beauté. On aimerait parler de sculpture, s’il ne s’agissait pas d’images... Les flous et le choix de cadrages photographiques contribuent à dérouter le spectateur sur le pourquoi du comment de ces représentations.
Sasha Katz a grandi à Moscou, tentaculaire, soviétique, éclectique. De son enfance elle retient les contes de fées et la mythologie slave, les livres de science populaire et les expositions que lui emmenait voir sa grand-mère. Choc d’une rétrospective Mikhaïl Vroubel, grand représentant du courant symboliste en Russie. Le peintre figure des thèmes mystiques en grand format. Sasha est fascinée par ses démons, et cette rencontre sur la toile du mythe et de la matière, une obsession qu’elle fera bientôt sienne.
Formée à British Higher School of Arts and Design, elle fait rapidement évoluer sa pratique artistique personnelle vers la représentation du corps nu, tour à tour provoquant, militant, sensuel, drôle, émouvant et secret. Des beautés non standard, et c’est sans doute ici qu’il convient le mieux de parler de réalisme : Sasha n’idéalise rien, et célèbre tout - le beau et le laid, le pur et l’obscur. Inspirées de celles qui peuplent la vie de l’artiste, amies fidèles ou silhouettes croisées quelque part, ces femmes ont laissé sur elle une empreinte : Sasha Katz ne les reproduit pas, mais en exprime un détail physique, une émotion perçue, un sentiment. Puis les met en scène, leur fait jouer la comédie de la vie, figurantes d’une mythologie contemporaine dont les thèmes récurrents seraient la solitude, le désir et la mort. Ces femmes sont-elles libres ou aliénées ?
Dix-sept œuvres de Sasha Katz, issues de sept séries réalisées entre 2022 et 2024, sont exposées à la Galerie Data. Elles témoignent d’une quête personnelle dans un style unique. Les images sont denses, souvent mélancoliques mais dissimulant une force de vie certaine. Un univers dans lequel les femmes sont puissantes et où l’amour est salvateur.
Trois œuvres invitées viennent compléter cette sélection. Le Profil de Marguerite Khnopff, réalisé en 1921, est une lithographie de Fernand Khnopff, maître du mouvement symboliste en Belgique. Quelques mois avant sa mort, il dessine sa sœur dans un état que l’on pourrait dire de grâce, teinté d’érotisme. Cette œuvre fait magnifiquement écho au travail de Sasha Katz, à sa dimension mystique et sensuelle, traitant de sujets qui traversent les siècles.
Doused in the Bright Light de Natalia Shlyakhovaya représente Moscou au petit matin. Issue de la série The Light réalisée en 2013, qui capture les moments volés d’une jeunesse à la recherche de repères, cette photographie illustre la genèse de Sasha Katz. Une grande beauté se dégage de la froideur et du mal-être qu’elle figure - une esthétique angoissante, que l’on retrouvera plus tard dans son travail.
Heir Apparent (« héritiers présomptifs ») est une œuvre de Ganbrood. Cet artiste néerlandais est notamment connu pour ses portraits photoréalistes réalisés à l’aide de l’IA, explorant la frontière ténue entre illusion et réalité. Spécialement conçue pour l’exposition, l’image représente deux jeunes enfants au regard indolent et dont la destinée semble tracée. C’est cette question même de la destinée qui rapproche ce travail des œuvres de Sasha Katz. Alors que tout est déjà décidé pour ces enfants, rien n’est inscrit pour les femmes de Sasha, éternellement libres ou désireuses de l’être, éternellement en quête. Et qui sait si la fillette à la coiffe ornée de perles ne deviendra pas l’une de ces héroïnes d’ici quelques années, en train de courir elle aussi, de jouir, ou de trouver le salut dans les eaux sombres ?
Sasha Katz x Guests
Du 24 avril au 10 Mai
Vernissage le Jeudi 24 Avril, de 18h à 21h